Comment simule-t-on le climat planétaire ?
Le climat est souvent défini à partir de paramètres « sensibles », c’est à dire ressentis au quotidien par chacun de nous, et liés à l’atmosphère : température de l’air, précipitations et vents principalement. Mais l’atmosphère n’est pas le seul acteur du climat. Le système climatique comprend les différents milieux naturels que sont l’atmosphère, les océans, les glaces marines et continentales, la végétation. Au sein de ces milieux, il faut tenir compte de la chimie et de la biologie : cycle du carbone ou de l’azote par exemple dans la végétation et dans les océans, chimie des gaz et des aérosols dans l’atmosphère, etc…
Pour simuler le climat planétaire, il faut donc créer un modèle informatique qui traite de tous ces compartiments et de leurs interactions. Historiquement, les modèles d’atmosphère, d’océan, de surfaces continentales, de glace, etc… ont été développés séparément. Ils sont assemblés pour devenir les composantes d’un modèle de climat.
Pour calculer les paramètres météorologiques, un modèle d’atmosphère doit connaître les conditions à la base de l’atmosphère, qu’il est incapable de calculer lui-même : la température de l’océan, celle du sol, la rugosité et les albédos des différences surfaces. Le modèle d’océan, lui, est capable de calculer la température de surface de la mer, mais pour cela il doit connaître le flux de chaleur en surface, les précipitations, l’évaporation, le vent. Toutes quantités que le modèle d’atmosphère sait calculer. Dans le modèle de climat, chaque composante calcule les quantités qui relèvent de sa compétence, et les communique aux composantes qui en ont besoin. En échange, chaque composante reçoit les quantités nécessaires à la poursuite de son calcul. Les composantes échangent généralement des quantités à leurs frontières communes (par exemple les échanges océan-atmosphère à la surface de la mer, ou les échanges sol-atmosphère sur les surfaces continentales). Les quantités échangées peuvent être des flux : flux d’énergie (rayonnement solaire et infra-rouge, flux de chaleur sensible et latent), flux d’eau (évaporation, précipitations, apport des rivières, formation et fontes des glaces, …), de quantité de mouvement (frottement du vent sur les surfaces océaniques ou continentales), de gaz (échange de CO2 à l’interface océan-atmosphère par exemple), de particules (soulèvement et dépôt de poussières, …). Il peut aussi s’agir des propriétés physiques des surfaces : température de surface de la mer ou du sol, albédo, rugosité, vent et courant à l’interface océan-atmosphère. Il existe aussi des échanges entre des modèles qui traitent des différents processus physiques, chimiques et biologiques dans un même milieu. Un modèle de dynamique océanique communiquera au modèle de biogéochimie marine les propriétés physiques tri-dimensionnelles de l’océan qui influent sur la biologie et la chimie marine: température, salinité, courants. Il recevra en échange les propriétés optiques de l’eau de mer (liées aux concentrations en organismes marins) qui lui sont nécessaires pour calculer comment le rayonnement solaire pénètre dans les couches de surface de l’océan. De même, un modèle de dynamique atmosphérique fournira au modèle de chimie atmosphérique température, humidité, vent, propriétés des nuages, fréquence des éclairs, etc… Le modèle de chimie pourra alors calculer les réactions chimiques et le transport par les vents, pour déterminer les quantités des différents gaz et aérosols qui en retour modifieront les transferts radiatifs au sein de l’atmosphère. Ces échanges entre les différentes composantes du modèle permettent de considérer les différentes interactions et rétroactions au sein du système climatique.
Deux modèles du système climatique sont utilisés en France : IPSL–CM développé par l’Institut Pierre-Simon Laplace et les laboratoires qui le composent, et CNRM–CM développé par le CNRM–GAME et le CERFACS. Leur développement passe par un travail très important d’évaluation et de validation.
Mais même si ces modèles de climat sont capables de calculer tous les paramètres du système climatique, ils ont toujours besoin d’informations extérieures. Pour qu’un tel modèle puisse calculer le climat futur, il faut en effet lui spécifier quelles quantités de gaz à effet de serre et d’aérosols seront émises par l’homme, ou comment l’utilisation des sols (agriculture et forêts) va évoluer dans le futur. Ces informations proviennent des scénarios climatiques, qui essayent de couvrir tous les futurs possibles de l’évolution de nos sociétés.